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Aventures, Vol.2

Aventures, Vol.2, par Pitoch, le 03 août 2005.

Aventures, Vol.2

Depuis une semaine, une pluie diluvienne s'abattait sur l'Angleterre. Le jeune et élégant majordome s'en serait parfaitement accommodé si ce déluge n'intervenait pas en plein milieu des vacances scolaires. Car cette coïncidence entraînait une catastrophe sans commune mesure à l'intérieur du manoir. Cette catastrophe avait six ans. Cette catastrophe s'appelait Lara.
Winston avait atteint la seconde moitié de la trentaine peu de temps auparavant. Il était au service de Lord Richard Croft depuis déjà quelques années. Depuis la mort de Lady Croft, en fait. De fait, le majordome avait vu grandir la petite fille du couple. Il avait même participé à son éducation, afin de soulager Lord Croft, dont la peine était immense. Il avait donc assisté à l'évolution du caractère de la petite fille. Elle était téméraire, voire casse-cou, ce qui augurait d'un avenir... intéressant.
En cet après-midi d'automne, Winston préparait le thé pour Lord Croft, plongé dans ses études, dans la belle bibliothèque qu'il s'était aménagé à l'étage, quand soudain il tendit l'oreille. Il reposa la théière et écouta attentivement, pour être sûr. Son appréhension grandit comme son doute se confirma : il n'y avait pas de bruit dans le manoir. Ce qui voulait dire deux choses : la petite fille était inconsciente, ou la petite fille préparait un mauvais coup. Dans les deux cas, c'était une catastrophe pour Winston, et le pire scénario n'était pas forcément celui que l'on pouvait croire. Il posa le plateau qu'il s'apprêtait à monter à son patron et partit à la recherche de Lara. Il quitta la cuisine et arriva dans le grand salon, où il trouva la petite fille. Son flegme typiquement britannique lui avait toujours permis de faire face à des situations extrêmes avec calme, sans jamais montrer ses émotions. La petite Lara était donc la première personne à réussir à l'abasourdir totalement.
- Miss Lara... gémit-il, catastrophé.
La petite fille était suspendue à l'air, à cinq bons mètres du sol, retenue au gigantesque lustre par un élastique qui lui serait la taille. Winston comprit la situation en quelques secondes : elle avait accroché, dieu sait comment, un élastique au lustre, puis elle était montée à l'étage, avait attaché l'autre bout de l'élastique à sa taille et s'était jetée dans le vide. Mais son faible poids avait entraîné la stabilisation de l'élastique à cinq mètres du salon, et l'empêchait maintenant de redescendre. Winston reprit son flegme, assuré qu'elle ne craignait pratiquement rien.
- Vous allez bien, Lara ? demanda-t-il.
- J'ai plus d'élan, répondit-elle, boudeuse.
- Je vois. Puis-je me permettre de vous demander par quel miracle vous vous retrouvez là-haut.
- J'ai tenté un truc rigolo.
- Je vois... N'y a-t-il donc pas d'autres activités « rigolotes » et moins dangereuses ?
- J'm'ennuie...
- Et si monsieur votre père vous voyait dans cette position ?
La petite fille se contenta de tirer la langue au majordome. Il fit demi-tour et alla chercher une échelle. Il entreprit alors de sortir Lara de cette situation difficile. Elle avait à peine posé les pieds à terre que le sombre carillon de l'entrée retentit. Winston fronça les sourcils : le Lord n'attendait personne à cette heure-ci.
- Essayez de ne pas faire de bêtises, miss, fit-il à la petite fille. Je dois ouvrir.
Il quitta le grand salon, rejoignit le hall d'entrée et ouvrit la lourde porte. Il se trouva face à face avec un homme, d'après la silhouette, portant une épaisse vareuse détrempée et un large chapeau qui masquait son visage. Bien que justifiée par la pluie, cette tenue rendait un côté mystérieux qui irrita le majordome et le rendit méfiant.
- Puis-je vous aider, monsieur ? s'enquit-il néanmoins.
- Je viens voir Richard Croft, répondit la silhouette.
La voix semblait âgée. Ce n'était donc pas un jeune délinquant. De toute façon, la vareuse était visiblement un vêtement de prix.
- Vous aviez rendez-vous, peut-être ? demanda Winston, tout en connaissant déjà la réponse.
- Non. Mais c'est une affaire importante qui m'amène.
Bien sûr, pensa Winston. Toutes les affaires sont importantes.
- Qui dois-je annoncer ?
- Jones.
Winston attendit, sans bouger.
- Juste Jones, précisa la silhouette.
Le majordome lui céda enfin le pas, l'invitant à entrer. Il referma derrière lui.
- Installez-vous ici, dit-il en désignant un canapé dans le hall. Je vais prévenir Lord Croft.
Il n'obtint aucune réponse, et n'en attendait de toute façon pas. Il monta les escaliers à double révolution tout en jetant un coup d'oeil à l'arrivant qui se débarrassait de ses habits trempés. C'était un homme de près de soixante-dix ans, les cheveux gris et la stature noble. Visiblement quelqu'un d'important. Winston arriva à la bibliothèque et entra : Lord Croft était en plein travail, assis à son petit bureau, plusieurs ouvrages ouverts devant lui.
- Ah, c'est l'heure du thé ! s'exclama-t-il en voyant arriver son majordome.
- Hélas, milord, je viens pour autre chose. Un certain Jones est en bas et vous demande.
Un sourire illumina soudain le visage de Croft.
- Jones ? A quoi ressemble-t-il ?
- Un vieil homme. Environ soixante-dix ans.
Le sourire disparut aussi vite qu'il était apparu.
- Oh... fit Croft, dépité. Ce Jones-là.
- Dois-je le renvoyer, milord ?
- Non, Winston. Je descends tout de suite.
Le majordome s'inclina en signe d'acquiescement.

***

- Professeur Jones, fit Richard Croft en descendant les escaliers. Je suis étonné de vous voir ici...
- Je n'y suis pas de gaieté de coeur, Croft, répondit le vieil homme. Croyez-le bien.
- J'en suis convaincu.
Les deux hommes se serrèrent la main sans chaleur. Pire, avec mépris. Ils donnaient l'impression, tous les deux, de se forcer à rester poli l'un envers l'autre. Ils semblaient prêts à s'insulter et à se cracher au visage. Croft l'invita néanmoins à s'asseoir.
- Que me vaut... l'honneur... de recevoir une sommité telle que vous, professeur Jones ?
- Vous êtes un être méprisable, Croft, répondit aussitôt Jones.
- Je vous prierais d'éviter de m'insulter sous mon toit, professeur. Restons cordiaux. Et vous n'avez pas répondu.
- Croft, avez-vous déjà entendu parler de Galilée ?
Richard se crispa, serrant la mâchoire : il voyait déjà où Henry Jones voulait en venir. Et ça ne lui plaisait pas du tout. Sa réaction de nervosité eut le mérite de détendre le vieux professeur, qui se permit même un petit sourire. Le majordome arriva sur ces entrefaites avec du thé et des biscuits. Il se retira rapidement, sentant la tension presque palpable entre les deux hommes.
- Oui, je connais Galilée, répondit Croft, mâchoire serrée.
- C'était un scientifique. Et un croyant pratiquant. Hélas, l'Eglise le traita d'hérétique pour avoir énoncé une vérité reconnue comme telle de nos jours.
- Oui, la Terre n'est pas le centre de l'univers.
- Pourtant il croyait en Dieu. Pour lui, sciences et religion se complétaient. Alors il créa un groupe secret de scientifiques catholiques. Leur but était de faire progresser la science en secret, en attendant que l'Eglise les reconnaisse. Hélas, de nos jours, ces nobles objectifs ont disparu, et ce groupement n'est plus qu'une secte criminelle...
Croft serra les poings, mais se força au calme.
- Les Illuminati ne sont pas une secte, professeur... fit-il entre ses dents. Encore moins criminelle.
- Non ? Comment nommeriez-vous cela, alors, Croft ? Inutile de répondre, vous êtes suffisamment méprisable comme cela.
Ils restèrent silencieux un moment, tout en buvant leur tasse de thé. Ce fut Richard Croft qui reprit la parole en premier.
- Finalement, qu'êtes-vous venu faire chez moi, Jones ?
- Ce sera « professeur » Jones, pour vous.
- ... Professeur Jones ?
- Vous connaissez Junior, n'est-ce pas ? Mon fils ?
- Oui, j'ai eu l'occasion de le rencontrer plusieurs fois.
- Pour une raison qui m'échappe totalement, Junior semble vous apprécier.
- Et c'est réciproque.
- Peu importe, il a le droit d'avoir des erreurs de jugement. Toujours est-il qu'il est parti à Rome il y a de cela une semaine.
- C'est une belle ville...
Henry ricana dans sa tasse.
- Votre déni devient ridicule, Croft. Mon fils est parti confirmer, ou infirmer, selon le cas, une rumeur insistante sur votre secte.
- Les Illuminati ne sont pas une...
- Peu importe. Il a disparu.
- Votre fils ?
- Oui, mon fils. Lors de son enquête à Rome.
- J'en suis navré.
- Ca m'étonnerait. Bref, j'en arrive à l'objet de ma visite, Croft. Vous allez dire à votre... « patron », de laisser mon fils tranquille.
- Je ne vois pas de quoi vous voulez parler.
- Ben voyons. S'il arrivait malheur à mon fils, j'ai bien peur que les Illuminati ne restent pas secrets bien longtemps.
- Vous me menacez ?
- Je menace votre secte. Et je protège mon fils.
Henry se leva et se dirigea de lui-même vers la porte d'entrée. Il remit sa lourde vareuse.
- Réfléchissez bien, Croft. Le monde croit les Illuminati disparus depuis des siècles. Une publicité internationale serait du plus mauvais effet.
Il était en train de remettre son chapeau quand il vit une petite fille s'approcher de lui. Son regard lançait des éclairs furibonds. Elle leva la tête vers lui d'un air de défi. Henry regarda Croft.
- Ma fille, Lara, répondit Richard à la question muette.
Le vieux professeur reposa de nouveau ses yeux sur la fillette.
- Je vous aime pas ! décréta-t-elle. Vous êtes méchant. Vous devez pas parler comme ça à mon papa.
Il tendit la main et lui caressa doucement la joue.
- J'espère qu'en grandissant, tu deviendras plus intelligente que ton père, petite, fit Henry.
Puis il sortit du manoir et referma la porte derrière lui. Lara courut se jeter dans les bras de son père, qui la serra fort.
- Winston ! appela Croft.
- Milord ?
- Appelez Rome et passez la communication dans mon bureau.

***

Indiana Jones n'eut pas le temps de se remettre les idées en place : il effaça un second crochet au menton, qui lui fit de nouveau voir trente-six chandelles. Mais il ricana malgré tout, pour tromper sa peur et impressionner ses agresseurs, au nombre de trois : deux qui le maintenaient, un qui le frappait.
- Vous avez tort de réagir comme ça, docteur Jones, fit justement ce dernier.
- Je vais pas pleurer devant des rigolos dans votre genre ! rétorqua Indy.
Il effaça aussitôt un coup de poing en plein foie qui le plia en deux. Il toussa, tentant de reprendre sa respiration.
- Vous êtes trop curieux, docteur Jones. Et notre association n'aime pas les curieux...
- Pourtant votre... « association » est captivante. Vous voulez pas me raconter cette histoire d'alignement de planètes ?
Il reçut un nouveau coup.
- Inutile, docteur Jones. Vous allez mourir.
- Dommage, j'aurais aimé savoir...
Soudain, une sirène de police retentit. Des lumières bleues et rouges tournaient alternativement, non loin de là, tandis qu'au milieu de ce vacarme, une voix hurla « Polizia ».
- Ah... fit Indy en souriant. On dirait que vous n'aurez pas le temps de finir.
- Détrompez-vous, docteur Jones. Ca ne change rien pour votre avenir !
L'homme dégaina son revolver et, le pointa sur la poitrine d'Indy, tira à trois reprises. Les deux autres le lâchèrent, et il s'écroula par terre, touché à mort.
Indy ouvrit les yeux en gémissant : il avait les poumons en feu. Il se rendit immédiatement compte qu'il se trouvait toujours sur le sol de l'entrepôt où les porte-flingues l'avaient abattu. Penché au-dessus de lui, un homme d'origine asiatique, d'une bonne cinquantaine d'années, le regardait en souriant. Il tenait à la main un objet étrange : un porte-voix assorti de deux gyrophares, un bleu et un rouge. Avec ça, on pouvait venir seul et à pieds et se faire passer pour toute une escouade de police. Indy sourit, malgré la douleur.
- C'est pas agréable, je parie, docteur Jones, fit l'asiatique.
Indy répondit « non » de la tête et tendit la main. L'homme l'aida à se remettre debout.
- Content de te voir, Demi-Lune...
- Tout le plaisir est pour moi, docteur Jones. T'as appris des trucs, au moins ?
- Non, mais ce n'est pas étonnant. Ce n'était que des porte-flingues. Si je veux de vrais renseignements, il faut que je m'approche du sommet de l'organisation.
- C'est clair, mais tu constates que le numéro un n'est pas facile d'accès...
- Certes. Donc il faut se tourner vers les autres. Les numéros deux, trois ou quatre.
- Justement, docteur Jones. Faut qu'on parle... Je t'offre un petit cappuccino devant le Colisée ?
- Ouais, volontiers.
Et ils quittèrent la zone industrielle de Rome pour rejoindre le centre historique.
Indy connaissait Demi-Lune depuis que celui-ci était enfant. Orphelin et débrouillard, vivant dans les rues de Shanghai dans les années trente, il s'était lié d'amitié avec l'aventurier, au point de l'accompagner en Inde et d'y affronter le mollah Ram. Mais le petit chinois n'était pas immortel, lui, et il avait vieilli, au point que, quarante ans plus tard, c'était deux adultes d'âge mûr qui s'étaient assis à la terrasse d'un bar, au centre de Rome. Malgré toutes ces années d'amitié, et bien que l'asiatique était plus vieux qu'Indy, celui-ci continuait à l'appeler Demi-Lune. Et Demi-Lune continuait à l'appeler « Docteur Jones ».
- Alors, que voulais-tu me dire ?
- On a un léger problème, docteur Jones. Ton père est entré dans la partie...
Indy manqua s'étouffer avec son cappuccino.
- Mon père ??? Mais... pourquoi ???
- D'après ce qu'on m'a dit, il a appris que tu avais disparu à Rome en enquêtant sur... qui tu sais, et il s'en est inquiété.
- Ce serait bien la première fois ! Et il a... merdé ?
- A peine, il est allé menacer en personne le numéro deux de... qui tu sais.
Indy en resta abasourdi, les yeux écarquillés.
- Notre plan risque de tomber à l'eau à cause de lui ! Comment tu l'as su?
- Croft m'a appelé pour me prévenir.
- Oui, et il a également dû appeler le numéro un pour le prévenir et protéger sa couverture. Résultat, les porte-flingues me sont tombés dessus.
- Tu as tout compris.
- Tu penses que Croft est grillé ?
- Je ne sais pas, honnêtement. Je ne pense pas, néanmoins : il est suffisamment intelligent pour t'avoir dénoncé. Ainsi il reste couvert. Tu comptes faire quoi ?
- Rattraper le désastre. Parler à Croft. Accélérer le plan, au cas où il soit grillé.
- Donc on va chez lui ?
- Oui. Et en infraction, au cas où il soit surveillé par son numéro un.
- Chouette, j'ai toujours rêvé de pénétrer illégalement dans un manoir anglais.

***

Vêtue de sa petite chemise de nuit, Lara sauta aux pieds de son lit. Deux heures du matin. Le manoir était parfaitement silencieux, et la nuit était particulièrement sombre. Le moment idéal pour une petite escapade. Du haut de ses six ans, la fillette possédait déjà un caractère assez fort et surtout une curiosité de tous les instants, qui faisait la fierté de son père lorsqu'elle s'intéressait à ses recherches et posait des questions sur tout. Lara était une petite fille intelligente, vive, et précoce. Mais elle restait une petite fille, et elle ne pouvait lutter contre la tentation de l'interdit et du danger. Comme faire des escapades nocturnes dans le manoir, au nez et à la barbe de son père, mais surtout de Winston. Décidée, elle jeta son ours en peluche sur le lit et sortit de sa chambre. Le couloir était sombre, mais ce n'était pas un problème. Pieds nus, elle se mit à le arpenter en silence, passant sans encombre devant la chambre de son père. Elle arriva au bout du couloir et grimpa sur la rampe de l'escalier. Son petit pyjama de satin glissa à merveille sur le bois ciré et elle se retrouva au bas des escaliers en deux temps trois mouvements. Elle exécuta une petite roulade arrière pour se rétablir. Complètement investie dans le personnage qu'elle jouait - une courageuse aventurière qui parcourait le monde et ses dangers pour trouver des artefacts archéologiques - elle se positionna accroupie dans un coin, un genou à terre, guettant le moindre bruit suspect, prête à bondir. Soudain, un bruit la fit sursauter. Là, ça ne venait pas de son imaginaire ! Sa vue s'adaptant à l'obscurité, elle distingua deux silhouettes au milieu du hall. Deux adultes, chez elle, à deux heures du matin ! La fillette fut aussitôt prise de panique : elle voulait bien jouer à l'aventurière, mais là, c'était bien réel. Elle lutta contre l'envie de hurler pour prévenir son père et Winston. Car le temps qu'ils arrivent, les deux voleurs l'auraient déjà tuée. Elle resta donc immobile, presque paralysée, les nerfs tendus au maximum. Les deux adultes bougeaient lentement et chuchotaient. Lara ne comprenait pas, sauf deux mots qu'elle réussit à capter : « tuer » et « père ». Et sa panique augmenta encore : ils étaient là pour tuer son père! Son papa ! Elle devait faire quelque chose. Hurler ? non. Les attaquer ? encore moins. Mais elle devait quand même agir. La solution se présenta d'elle-même. Non loin de la fillette se trouvait un skateboard, qu'elle avait encore dû laisser traîner. Winston la harcelait pour qu'elle range ce genre de jouets, car, disait-il, quelqu'un pourrait marcher dessus et se faire mal. Et c'était justement là le plan qu'elle venait de mettre au point. Elle attrapa discrètement le skate et le fit rouler vers les inconnus. Le bruit les alerta et elle les vit regarder autour d'eux. Autour d'eux, mais pas au sol. Quand le skate s'arrêta, ils n'avaient pas compris d'où venait le bruit. Après un moment, ils se remirent à bouger. Lara pria, et ses prières furent rapidement exaucées : un des adultes marcha sur le skate. La planche s'envola et heurta avec fracas le mur, non loin de la fillette. La victime fit un vol plané dans le même temps et s'écroula douloureusement sur le dos, en retenant des jurons. Lara courut vers les escaliers, sans hésiter, cherchant une nouvelle « arme » : la guerre pouvait commencer.

***

Indy et Demi-Lune s'arrêtèrent à bonne distance du manoir et terminèrent à pieds. Utilisant une ouverture dans la grille, ils entrèrent dans la propriété et traversèrent le parc lentement, l'obscurité étant totale. Indy s'était refusé à se servir de la moindre lumière, de peur de griller la couverture de Croft auprès des Illuminati. Ils atteignirent tant bien que mal le manoir en lui-même et entrèrent par la grande porte, sans faire de bruit. Ils se retrouvèrent dans un grand hall richement aménagé, uniquement éclairé par la lune. Toute la demeure était silencieuse.
- Ca me fait bizarre... murmura Demi-Lune.
- Normal. Je déteste ça aussi, ce n'est pas correct. Mais on a pas le choix, pour protéger Croft.
- Je sais. Il nous attend où ?
- Dans sa bibliothèque. Si on rattrape le coup, je te jure que je vais tuer mon père !
- Ouais, ben en attendant, restons pas là.
Soudain, un bruit sourd crevant le silence ambiant. Une sorte de roulement qui résonnait lugubrement dans le hall. Ils regardèrent autour d'eux, cherchant d'où provenait ce bruit. Tout redevint silencieux.
- C'était quoi, ça ? demanda Demi-Lune.
- Aucune idée...
Ils restèrent immobiles un moment, guettant le moindre danger.
- Bon, allons-y, décida Indy.
Ils reprirent leur progression. Soudain, Demi-Lune dérapa et s'écroula lourdement.
- Put... gémit-il.
- Merde, Demi-Lune, regarde où tu mets les pieds !
- Y'avait un skate, docteur Jones, j'y peux rien !
- Avec le boucan qu'on fait, je suis étonné qu'on ne nous ait pas encore repéré !
Il aida son ami à se relever et ils continuèrent. Ils montèrent à l'étage et trouvèrent la bibliothèque. Richard Croft les y attendait.

***

La petite Lara monta les escaliers quatre à quatre, sans bruit et sans se faire repérer. Elle traversa le couloir comme une furie, sans s'arrêter, et prit un virage serré dans le couloir qui menait à la bibliothèque, là où elle comptait monter un nouveau piège pour protéger son papa. Courant maintenant à perdre haleine, elle ne put éviter la collision avec l'un des inconnus. Elle le heurta de plein fouet, puis tomba à la renverse, sur les fesses. Prise au piège ! Lara décida que le temps n'était plus à la discrétion : il en allait de sa vie ainsi que de celle de son père. Elle se mit donc à hurler.
- Eh bien, eh bien ! fit Winston en la relevant. Arrêtez de hurler, ça n'est que moi.
Elle regarda l'adulte qu'elle venait de heurter : il s'agissait bien du jeune majordome de son père. Soudain confuse, la jeune fille prit un air boudeur.
- Miss Lara Croft, fit Winston. Pourrais-je savoir ce que vous faites debout, en petite tenue, à deux heures du matin ?
- J'ai besoin d'aide, répondit la fillette.
- Pour ?
- Mon papa est en danger. Il y a des méchants hommes qui sont entrés par le grand hall.
Winston leva un sourcil circonspect. Il prit la jeune fille par la main et commença à la ramener à sa chambre. Elle résista.
- Mais c'est vrai ! fit-elle. Même que j'ai fait tomber l'un d'eux avec mon skate !
- Monsieur votre père va très bien, Lara. Je veille sur lui. Vous avez fait un mauvais rêve.
- Non ! cria-t-elle. J'étais réveillée !
Elle se débattit, tentant de faire lâcher prise au majordome. Mais celui-ci résistait. Lara était au bord des larmes quand elle vit son père sortir de la bibliothèque.
- Que se passe-t-il ? demanda-t-il.
Le majordome lâcha la fillette, qui se précipita aussitôt dans les bras de son père.
- Papa, y'a des gens qui veulent te tuer ! fit-elle.
- Mais non, ma chérie, ne t'inquiète pas. Tu as fait un cauchemar.
- Non !
- Mon coeur, tu me fais confiance ?
- Oui.
- Tu me crois si je te dis que je ne risque rien, que je vais bien ?
- Oui.
- Tu vas te recoucher ?
- Oui. Viens avec moi.
- Non, ma chérie, tu vas te recoucher toute seule. Winston va te ramener.
- Non.
- Si, ma chérie. Je vais bien, tu vois bien.
- Oui.
- Tu es rassurée ?
- Oui.
- Tu vas dormir ?
- Oui.
Il l'embrassa tendrement puis la fit passer de ses bras à ceux de Winston. Le majordome, tenant Lara dans ses bras, la ramena à sa chambre, tandis que son père retournait à la bibliothèque. Quand il referma derrière lui, Lara aurait pu jurer avoir vu un homme avec un blouson en cuir.

***

- Excusez-moi, messieurs, fit Richard en refermant la porte. Ma fille. Elle vous a vu.
Demi-Lune se frotta la nuque, encore douloureuse de sa chute.
- Sacrée gamine, grimaça-t-il.
- Oui. Et elle va rentrer dans mon plan.
- Comment ça ? intervint Indy.
Croft se dirigea vers un bureau et sortit un petit objet hexagonal, assez plat, dont le centre contenait une sorte de pierre précieuse assez brillante.
- Je ne peux hélas pas me permettre de rentrer dans les détails, Indiana, fit Lord Croft. La venue de votre père a déjà bien trop compliqué les choses.
- Je comprends.
- Les Illuminati cherchent à récupérer deux morceaux d'un artefact, en forme de triangle. Ce triangle, une fois rassemblé, permet, s'il est conjugué à l'alignement parfait des planètes, d'accéder au contrôle de l'Espace et du Temps.
- Technologie extra-terrestre ?
Il montra l'objet qu'il tenait dans la main.
- Oui, et ceci aussi. C'est une clé qui permet de récupérer un morceau du triangle. Elle restera inactive jusqu'à quarante-huit heures avant l'alignement parfait.
- Ca surviendra quand ? demanda Demi-Lune.
- Dans vingt-huit ans.
- OK, je serais plus là.
- Moi non plus. D'autant que le professeur Jones, en venant ici, m'a quasiment condamné.
- C'est donc là qu'intervient votre fille, fit Indy.
- Exactement. Je vais cacher la clé, afin de la protéger des Illuminati. Mais je laisserais des indices à ma fille afin qu'elle puisse la retrouver et empêcher la secte d'obtenir ces pouvoirs extra-terrestres.
- Ca reste assez aléatoire, non ? Beaucoup de circonstances particulières pourraient dérégler votre plan et entraîner une catastrophe.
- Je prends le risque. Mais de toute façon, je compte profiter de votre aide aussi, Indiana. Sans vous dévoiler quoi que ce soit.
- Vous avez donc pensé à tout. Que dois-je faire ?
Croft se leva et ouvrit le tiroir d'un bureau. Il en sortit une petite feuille qu'il tendit à Indy. Celui-ci lut les quelques lignes.
- Un poème ?
- L'extrait d'un poème, oui. Dans vingt-huit ans, vous l'amènerez à un transporteur quelconque, afin de le faire parvenir par courrier à ma fille.
- C'est un indice pour trouver la clé ?
Croft ne répondit pas. Indy, comme Demi-Lune, respectèrent son silence. Sans un mot, Indy rangea les quelques vers dans sa poche. Richard voulut reprendre la parole, mais se ravisa : il semblait chercher ses mots. Ses deux invités attendirent sans un mot.
- Votre père a raison, Indiana, finit-il par dire. Les Illuminati sont devenues une secte violente et anti-chrétienne. Bien loin de leur but initial. Je me considère comme un vrai Illuminatus. Mais je dois me battre à la fois contre la papauté, qui continue à faire passer le message que nous sommes un danger, et contre mes propres confrères, qui ont oublié l'objectif initial du groupement. C'est... trop difficile.
Il se tut, reprenant sa respiration et réfléchissant à ses prochaines paroles.
- La venue de votre père a précipité ma chute. Mais elle n'en est pas uniquement responsable. Je ne dis pas ça pour vous rassurer, Indiana : c'est la vérité. Le Grand Maître sait que je suis un Illuminatus originel. Il ne lui manquait que des preuves pour me faire disparaître sans occasionner une scission. Ca ne devrait plus tarder.
- Fuyez, alors. Disparaissez de leur secte et continuez à vivre pour votre fille, intervint Demi-Lune.
- Ma... disparition tragique sera un moteur pour sa vie future.
- Ce sera un drame, plutôt.
- Un drame, oui, mais qui forgera son caractère et sa force.
- Vous êtes en train de vous suicider juste pour que votre fille devienne assez forte pour sauver le monde ???
- Précisément.
- Mais ????
Indy calma son ami. Demi-Lune, choqué, se renferma dans un mutisme d'incompréhension. Croft le regarda un moment, puis reporta son regard sur l'archéologue immortel.
- Acceptez-vous, Indiana Jones ? fit-il. Acceptez-vous de protéger ma fille, de la guider vers l'archéologie et l'aventure, sans jamais vous montrer, dans l'ombre ? Acceptez-vous de l'influencer le plus discrètement possible, afin qu'elle soit prête à sauver le monde ? L'acceptez-vous ?
Indy resta immobile, regardant Richard Croft dans les yeux. Puis lentement, il hocha la tête en signe d'assentiment. Croft soupira de soulagement et prit trois verres, qu'il remplit de scotch. Il en distribua deux et leva le troisième, pour porter un toast. Ses yeux devinrent humides, puis des larmes coulèrent sans retenue sur ses joues. Indy et Demi-Lune levèrent également leurs verres.
- A Lara Croft.

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